AIDER UN ENFANT À GÉRER SES ÉMOTIONS

Le monde change, les enfants aussi. Voici quelques idées, issues des techniques de méditation, qui peuvent facilement être appliquées avec des enfants quand ils se retrouvent pris par des émotions désagréables. Ces idées n’ont rien à voir avec les techniques de bien-être qui consistent la plupart du temps à éviter ou à modifier les émotions. Quand une émotion désagréable apparaît, la méditation invite à se demander « Qu’est-ce que je sens ? » Alors que la plupart des techniques de gestion des émotions invitent à se demander « Comment ne plus sentir cela ? »

Observer une émotion, en la laissant tranquille, c’est lui donner la possibilité de se libérer. Éviter une émotion, ou la réprimer, a pour effet de l’enfouir au plus profond de soi. Elle se cache, pour mieux ressortir plus tard. C’est probablement pour cela que de nombreux adultes continuent à avoir peur du noir et des monstres…

À savoir :

Les phrases citées comme exemples ci-dessous sont délibérément simplistes pour qu’elles soient comprises par les enfants. Adaptez-les si nécessaire.
Il n’y a pas de priorité, pas de point qui soit mieux que les autres. Utilisez-les plutôt comme un ensemble.
Quand nous sommes pris par nos émotions, nous sommes tous un peu des enfants. Alors n’hésitez pas à également utiliser ces idées pour vous.

1. Comment tu te sens ?

En utilisant le dessin ci-dessus (téléchargez-le ici en .zip), demandez à l’enfant de choisir le visage qui correspond le mieux à ce qu’il sent maintenant. S’il en montre plusieurs c’est OK.

2. Comment tu sais que… ?

Le but de cette question est de sortir du mental et de revenir aux sensations. « Je suis triste » ne sont que des mots. La vraie tristesse ne se trouve pas dans la tête, elle se trouve au niveau du corps. « Je suis triste » est une interprétation mentale d’une sensation. Mais laquelle ?

  • Comment tu sais que tu es énervé ? Comment ça fait dans le corps ?
  • Comment tu sais que tu es triste ? Comment c’est à l’intérieur ?
  • Comment tu sais que tu as peur ? Ça fait quoi ?

3. Où est-elle ?

Demandez à l’enfant de vous montrer avec son doigt où se trouve son émotion, dans son corps ou sur le dessin :  télécharger le bonhomme (.zip). Vous pouvez l’imprimer et le coller au mur pour obliger l’enfant à se lever et à vous montrer l’endroit. Cela changera complètement sa vision des émotions et deviendra une sorte de jeu.

  • Il est où ton énervement ?
  • Elle est où la peur ?
  • Elle est où la tristesse ?

Que faire quand il a trouvé l’émotion ?

Contentez-vous d’observer ce qui se passe quand il place son attention non plus sur l’émotion mais sur la sensation. Ensuite vous pourrez éventuellement aller plus en profondeur avec le point suivant.

4. Comment c’est ?

Quand l’enfant a trouvé son émotion, vous pouvez lui demander plus précisément comment elle est.

  • Comment c’est ? Gros, petit, lourd, léger ?
  • C’est quelle couleur ?
  • Est-ce que ça bouge ?

Et après ? Essayez et voyez ce qui se passe…

5. Le monstre est dans l’armoire !

J’ai passé les 10 premières années de ma vie à avoir peur du noir, des ombres, du monstre dans l’armoire et de ceux en-dessous de mon lit. Tous les soirs, ma gentille maman regardait sous le lit et me disait qu’il n’y avait rien. Je pensais qu’ils se cachaient et qu’elle ne pouvait donc pas les voir.

Mais pourquoi les monstres disparaissent quand on grandit ? Sont-ils partis, ou avons-nous tout simplement moins peur ? Non, les monstres ne peuvent pas partir, puisqu’ils n’ont jamais été là… Voici donc une phrase qui peut être difficile à comprendre et qui est pourtant tellement évidente quand on se met à observer la réalité :

L’enfant n’a pas peur parce qu’il y a un monstre en-dessous de son lit. Il y a un monstre en dessous de son lit parce qu’il a peur.

Le problème est donc bien la peur. Pourtant, nous consacrons souvent toute notre énergie à l’aider à faire partir le monstre…

Quand un enfant vous dit qu’il y a un monstre dans son armoire ou en-dessous de son lit et qu’il a peur, demandez-lui où est le monstre, puis où est la peur. Il sait très bien où est le monstre, et aller voir dans l’armoire ne sert à rien puisqu’il est parti et qu’il va revenir. Par contre, trouver la peur peut être moins évident. Aidez-le. Quand il l’aura trouvée, ne faites rien de plus ou passez à d’autres points de cet article. S’il ne trouve rien, dites-lui que ce n’est pas important et recommencez le lendemain.

6. Éviter de nier l’émotion

Ce n’est pas notre faute, mais nous avons pratiquement tous appris à gérer nos émotions de manière pas très saine. Alors voici quelques idées pour gérer les réactions de l’enfant un peu différemment :

Bof : « Ne sois pas triste, on va le retrouver ton jouet » (= ne sens pas ça !)
Mieux : « Tu es triste parce que tu as perdu ton jouet ? Viens avec moi, on va le retrouver… » (= je vais t’aider)

Bof : « N’aie pas peur, il n’y a rien » (= arrête de sentir ça !)
Mieux : « Tu as peur parce que tu crois qu’il y a quelque chose ? Qu’est-ce que c’est ? » (= invitation à découvrir)

7. Expliquer ce qu’est une émotion

Nombre de gens découvrent ce qu’est une émotion à l’âge adulte. Pourquoi ? Parce que personne ne leur a expliqué quand ils étaient enfants et que soit ils les ont refoulées soit ils les ont mélangées pour en faire un paquet gluant et ingérable. Alors même si vous pensez qu’ils le savent, expliquez à vos enfants les règles de base des émotions :

  • Tout le monde a des émotions, même les animaux. Certaines sont agréables et d’autres non. Mais elles servent toutes à quelque chose.
  • Une émotion dure quelques minutes maximum. Après, si elle reste, c’est parce qu’on la garde en soi (sans faire exprès !).
  • Quand on bloque une émotion, elle reste coincée et elle ressort toujours (toujours!) plus tard.
  • Parler à quelqu’un ou écrire dans un cahier ce qu’on ressent permet de laisser sortir plus facilement les émotions.
  • On peut ressentir plusieurs émotions à la fois. Par exemple être content de partir en vacances et avoir peur parce qu’on ne connait pas l’endroit.
  • Quand on voit quelqu’un ou quelque chose de triste, on sent de la tristesse. C’est normal. Cela ne veut pas dire que nous sommes tristes, cela veut dire que l’on ressent ce que l’autre sent. Nous sommes tous un peu en contact avec les autres. Parfois ça fait tellement peur que des gens préfèrent couper le contact. Alors ils ne ressentent plus rien. On dirait que c’est mieux de ne plus sentir la tristesse. Mais si on ne sent plus la tristesse on ne sent plus la joie non plus. Et la vie devient très difficile.

Quelques livres à découvrir :

« Mes émotions », un cahier d’exercice pour les petits, avec du découpage et des gommettes à coller :

« Les émotions, émois et moi… », pour ceux qui ne jouent plus avec les gommettes :

Et le top du top, pour tout le monde :
« Émotions, enquête et mode d’emploi »

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